Rencontre avec des élèves, des professeurs et le directeur de l’IUT du Creusot pour mieux comprendre les inquiétudes et les enjeux autour de la réforme des séries techniques, STI et STL.
Une réforme, oui, mais pas de cette nature. C’est en substance le message des professeurs de la série sciences et technologies industrielles (STI) de Saône-et-Loire. Annoncée en avril par le ministère de l’Éducation qui souhaite la mettre en place dès 2011, cette réforme (qui concerne aussi la série sciences et techniques de laboratoires) ne correspond pas, selon les enseignants, aux besoins des élèves, ni aux besoins du marché du travail. Elle impliquerait en effet la perte d’une partie de l’enseignement technique.
Une série plus généraliste
« Aujourd’hui, en STI, 40 % de l’enseignement est général et 60 % est technique. Avec cette réforme, ces pourcentages seraient inversés», explique Jean-Jacques Liodenot, professeur en STI au lycée Léon Blum du Creusot. Par ailleurs, « l’objectif de cette réforme est de mener les élèves vers des Master (bac +5, ndlr), alors ça ne correspond pas à leur envie, ni à leur profil. » Au lycée Léon Blum, une centaine de jeunes a choisi pour diverses raisons de se lancer en STI, mais avec un objectif commun : obtenir un diplôme. Corantin veut être pompier de Paris : « ce bac me semblait plus simple. Je veux m’assurer un diplôme, même si je n’en ai pas vraiment besoin pour passer les concours de pompiers ».
Série S : « trop dure »
La série S (scientifique) aurait été « trop difficile » selon lui. La filière technique, c’est aussi le choix Lilian. Il compte par la suite intégrer une école préparatoire aux écoles d’ingénieur, à Dijon, qui accueille des jeunes diplômés en STI. Les deux jeunes hommes l’assurent : si la série avait été plus généraliste, ils ne l’auraient pas intégré. Qu’auraient-ils fait alors ? Difficile à dire. La perte d’une partie de l’enseignement technique inquiète également le directeur de l’IUT, Patrick Gorria. Il craint que les élèves soient désensibilisés à ces matières, qu’ils perdent des « bases » nécessaires à la poursuite de l’enseignement et que beaucoup baissent les bras face à la perspective d’un cursus long. Pour le moment, ces élèves, souvent d’un niveau scolaire moyen, choisissent, via un DUT ou un BTS, de poursuivre leurs études vers une licence. Flaviano et Sylvain ont intégrés, eux, un BTS. Sylvain, qui suit une spécialisation en génie électrique, ne cache pas qu’il n’avait « pas le niveau » pour passer un baccalauréat S. « Je savais que le bac STI était plus théorique, moins généraliste », raconte le jeune homme, assuré de trouver un emploi à l’issue de sa formation. « Il faut la réformer, car il y a un manque d’attractivité de cette série. Il faut la positionner autrement, mais en laissant la connexion industrielle », conclut Joël Liaboeuf, chef de travaux et responsable des ateliers et des enseignements techniques au lycée Léon Blum.
florence richardPublié le 20/11/2010